25 juin 2018

8 juin 2018 : Discours d'Antoine Gentil (LA 58/63) à la gare de Gaillon ...


Les Andelys
Le 8 juin 2018
Monsieur le Président,
Chers Amis,
 Du haut de ces terrasses, plus d’un siècle aurait dû nous contempler.
 En effet 131 ans,
C’eut été cette année l’âge de notre école,
Si une décision aussi sentencieuse que regrettable, n’avait dans l’emportement de l’année 68, mis fin à son existence par dissolution, comme on punit un régiment.
 C’était sans compter sur ceux pour qui elle constituait un pan de vie et qui ont voulu virtuellement mais solennellement en perpétuer l’existence et le souvenir.
 Comment ne pas mettre en exergue, notre infatigable Président, Jacques MASSIAT,
Notre dynamique secrétaire, Patrick ROHRBEIN
 et notre cher, très cher Trésorier qui compte beaucoup pour nous, Michel DUFILS, auxquels il faut bien sûr associer quelques professeurs émérites du collège ROSA PARKS et du lycée JEAN MOULIN, leurs directeur et proviseur.

***


Se souvenir, ce n’est pas ringard, comme le proclament sans vergogne quelques esprits faussement progressistes ;
Ce n’est pas non plus succomber à une nostalgie maladive (l’incontournable « c’était mieux avant »), pas plus que se complaire dans la tristesse, 
C’est laisser venir à nous avec bonheur des images, des moments, des évènements du passé qui nous réjouissent.

Et c’est bien dans cet esprit que nous nous sommes rassemblés aujourd’hui et jusqu’à demain, pour faire maintenant mémoire de notre passage dans cet endroit.

Je veux dire : La gare de GAILLON – AUBEVOYE 
GAILLON – AUBEVOYE

Une dualité historique et pour nous une dualité de circonstances
Celles d’ici et celles d’en face
Je commencerai pour mieux l’achever par celles d’en face 
A la fin de la 2ème guerre mondiale, notre école repliée provisoirement à BEZIERS, à l’ombre des allées Paul Riquet, génial concepteur du Canal du Midi, retrouve ses pénates et se réinstalle dans ses murs. 
La guerre avait fait ses basses œuvres, plus de pont plus de gare.
Il a fallu faire du provisoire pour faire en sorte que les élèves de l’EMP puissent partir en « perm ». 
C’est ainsi que la gare de GAILLON – AUBEVOYE est devenue le symbole des vacances, des retrouvailles avec nos familles mais aussi, et à l’inverse, du retour à la compagnie et des retrouvailles avec l’encadrement et le travail scolaire. 

Alors, alors Monsieur PEPY
Vous auriez pu, vous auriez dû étancher notre soif de reconnaissance, répondre favorablement à notre souhait, à notre légitime aspiration de laisser une trace du passage entre 1945 et 1968, deux dates historiques par ailleurs, de plus de 70.000 élèves de l’EMP des Andelys.

C’est plus que dommage et dommageable ! 
Vous auriez de surcroit appris des choses d’importance, à savoir :
Que nous n’arrivions pas dans votre gare comme des voyageurs ordinaires
Parce qu’avant de monter dans votre train, à l’époque encore à vapeur mais qui roulait et osait même arriver à l’heure, nous avions usé de force cirage et mirror pour nous présenter au guichet dans le plus bel état.

Vous auriez appris :
Que nous avions, la veille, perçu notre viatique : 1 ou 2 francs (très anciens), un sandwich ou deux suivant les km à parcourir, un peu de lait concentré, quelques morceaux de chocolat, une ou deux pates de fruit, une orange.

Qu’après une revue de détail pour s’assurer de la perfection de la tenue, on grimpait, sourire aux lèves dans les cars et camions que nous avions vu la veille ou tôt le matin, remonter l’allée centrale. 
C’était donc bien vrai, on allait partir en perm,
Tous ensemble…
Tous ensemble ou presque.

Il y avait toujours un André Goutal pour ramasser un ou deux « pains » faute d’avoir accepté de marcher à la baguette. 
Nous étions un peu triste pour lui. Mais lui était goguenard – car c’était un rebelle l’André.
Son destin révolutionnaire était écrit……..
Il est devenu commissaire divisionnaire.

Au bout du compte nous étions d’abord joyeux.
Rien ne pouvait altérer cette allégresse,
Ni le mélange du parfum de l’orange précocement épluchée par certains et des effluves du carburant du GMC, à vous donner la nausée,
Ni l’annonce faite par les plus grands que le pont provisoire, que nous devions franchir avant d’arriver à la gare salvatrice, risquait à tout moment de s’écrouler ; il est vrai que le bruit du passage des roues de nos véhicules sur les planches disjointes pouvaient effrayer.

En réalité la joie de partir en vacances effaçait tous ces aléas.
On s’en allait, Monsieur le Président, vers Saint-Lazare, qui à l’époque, Monsieur le Président, n’était pas paralysé. 
Vous auriez encore appris :
Qu’on irait au Cinéac en attendant l’heure de la correspondance, ou flânerait aux alentours,
Le béret glissé sous l’épaulette bravant tous les interdits, les plus grands feraient un détour par le passage de Budapest et s’en vanteraient.

Voilà Monsieur le Président ce que vous auriez pu apprendre et bien d’autres choses encore.
  
Vous ne l’avez pas voulu alors pourtant que vous clamez qu’avec la SNCF, tout est possible,
Sauf de nous accorder cette petite faveur de pouvoir apposer une petite plaque discrète, mais ô combien symbolique pour nous, même pas sur la façade, mais sur le mur pignon de cette gare mythique.
Décidément la SNCF déraille. 
Vous nous avez , sous un prétexte fallacieux, privé du domaine public.
 Bien heureusement, il nous a été donné l’opportunité d’exaucer notre vœu publiquement sur le domaine privé.

Grâce à vous, Monsieur Mustafa DOGAN, grâce à vous, qui êtes désormais l’ami des AET, qui nous avez donné l’hospitalité et le bonheur d’organiser chez vous cette cérémonie festive et amicale qui nous tenait tant à cœur.
Vous resterez dans le notre et nous ne vous en remercierons jamais assez.

Chers Camarades, je vous propose avant que les hautes autorités ne dévoilent cette plaque « mémorial », d’envoyer à l’adresse de notre hôte… un triple Hip Hip Hip Hourrah suivi d’une minute d’applaudissements. Je vous remercie.